La musique pourrait aider votre enfant Ă venir Ă bout de sa dyslexie. Câest ce que montre une Ă©quipe Inserm qui a soumis des enfants Ă une cure dâapprentissage musical ou dâart plastique pendant six mois. Les rĂ©sultats sont trĂšs en faveur de la musique, sous rĂ©serve quâelle implique du rythme. Le solfĂšge seul ne suffit pas.
Tout est parti de travaux antĂ©rieurs montrant que le traitement de la musique et du langage (impliquant le discernement des sons), sâeffectue dans les mĂȘmes zones du cerveau, en particulier les aires temporales et lâaire dite de Broca. Et de fait, des Ă©tudes menĂ©es chez de grands musiciens qui sâexercent pendant des heures montrent que leurs capacitĂ©s de langage sont exacerbĂ©es. Ils discriminent beaucoup mieux les sons et apprennent plus facilement une langue Ă©trangĂšre que la moyenne. « Le rythme semble rĂ©guler lâactivitĂ© oscillatoire cĂ©rĂ©brale qui est nĂ©cessaire au traitement du langage et Ă la reconnaissance des sons », confirme Daniele Schön (unitĂ© 1106 Inserm/universitĂ© Aix-Marseille, Institut de neurosciences des systĂšmes), coauteur de ces travaux.
Or la dyslexie, qui se manifeste par des difficultĂ©s de lecture, serait due Ă un problĂšme dâencodage des sons. Les enfants auraient par exemple du mal Ă diffĂ©rencier un BA dâun PA, et seraient donc incapables de restituer deux sons diffĂ©rents Ă la lecture, laissant croire Ă une incapacitĂ© Ă reconnaĂźtre les lettres. Et lĂ encore, de prĂ©cĂ©dents travaux ont montrĂ© que les enfants qui ont des difficultĂ©s en lecture prĂ©sentent Ă©galement des problĂšmes de coordination sur le rythme que ce soit en chant, en danse, ou tout simplement en tapant des mains sur une mĂ©lodie.
Suite Ă cette revue de littĂ©rature et Ă ce faisceau dâĂ©lĂ©ments convergents, les chercheurs ont testĂ© le bĂ©nĂ©fice dâune cure de musique chez des enfants dyslexiques de 8 Ă 11 ans. Pour vĂ©rifier que les progrĂšs Ă©ventuels ne seraient pas liĂ©s Ă lâinvestissement personnel dans une activitĂ© ou encore au fait de vieillir de quelques mois, ils ont Ă©galement demandĂ© Ă un autre groupe dâenfants prĂ©sentant le mĂȘme profil de suivre des sĂ©ances dâart plastique. Ces traitements Ă©taient dispensĂ©s lors de sĂ©ances collectives, deux fois par semaine et pendant six mois. ParallĂšlement, tous les participants ont Ă©galement effectuĂ© des exercices dâorthophonie. Pour les sĂ©ances de musique, des professeurs avaient Ă©tĂ© formĂ©s Ă une pĂ©dagogie particuliĂšre axĂ©e sur les rythmes pour que tous les enfants bĂ©nĂ©ficient de la mĂȘme formation. NĂ©anmoins, « en situation rĂ©elle, tout programme incluant du rythme, que ce soit via le chant ou encore la danse, est intĂ©ressant », prĂ©cise le chercheur.
Au terme des sĂ©ances, les auteurs ont demandĂ© Ă tous les enfants de lire un texte et ont constatĂ© que 60 % des enfants du groupe « musique » sâĂ©taient amĂ©liorĂ© en lecture au point de sortir des critĂšres diagnostic de dyslexie, contre seulement 28 % de ceux du groupe « art plastique ». Les chercheurs ont en outre soumis aux enfants un autre texte, contenant des mots inventĂ©s de façon Ă tester leurs capacitĂ©s de dĂ©chiffrage : 75 % des enfants du groupe « musique » ont performĂ©, contre 36 % dans le groupe « art plastique ».
Ces rĂ©sultats sont tout simplement impressionnants. « Il y a vĂ©ritablement un transfert de compĂ©tence au sein du cerveau, du rythme vers lâhabilitĂ© Ă discerner les sons et donc Ă lire correctement, explique le chercheur. Et on peut imaginer que pour les enfants plus lents Ă progresser, le bĂ©nĂ©fice de la musique devrait se poursuivre avec le temps ». En outre, ce traitement est assez facilement applicable : « Les sĂ©ances ne demandent pas dâexpertise particuliĂšre de la part des professeurs et il existe des musicothĂ©rapeutes ou professeurs de musique qui ont lâhabitude de ces pratiques. Il faut juste du rythme ! Lâenfant doit sâamuser et avoir envie dây aller. Et le coĂ»t peut ĂȘtre assez modĂ©rĂ©. Mais ces sĂ©ances doivent venir en complĂ©ment de lâorthophonie qui nâa jamais Ă©tĂ© abandonnĂ©e pendant notre Ă©tude et qui reste un pivot de la prise en charge », conclut-il.
Cette Ă©tude est parue dans la revue PLOS One.